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Encre d'époque.
19 août 2019

"Combattants de l'Empire : les troupes coloniales dans la Grande Guerre" sous la dir. de Philippe Button et Marc Michel

 

Saluons la dédicace du livre qui s'adresse notamment à l'historien Daniel Lefeuvre qui avait écrit l'excellent livre Pour en finir avec la repentance coloniale. Alors que la bien-pensance cherche à éradiquer toute pensée contraire à la sienne et refuse d'entendre ce qui ne va pas dans son sens, il est bon de voir qu'il existe encore des historiens qui sont au-dessus.

 

combattants de l'empire coloniaux

Résumé :

Tirailleurs sénégalais, spahis algériens, troupes indochinoises : autant de soldats des colonies recrutés, volontairement ou non, sur les fronts européens de la Grande Guerre pour aider leur métropole dans un conflit qui, à première vue, n'était pas le leur. De la bataille oubliée de Dobro Polje aux graffitis du Chemin des Dames en passant par les mutineries d'août 1917, cet ouvrage aborde la spécificité du cas français sans négliger les expériences des empires anglais, italien et allemand. Cent ans après les événements, grâce à la somme de travaux inédits d'historiens émérites, il est possible, au-delà des polémiques, de mettre en lumière cet aspect essentiel de la Première Guerre mondiale.

Mon avis :

Ce livre se propose d’aborder les divers côtés des forces coloniales durant le conflit de 1914-1918. Il fut dans l’ensemble intéressant à lire. En effet si tous les sujets ne m’ont pas intéressée en entier car ils étaient parfois trop militaires dans le développement où parfois c'était juste la problématique qui ne me passionnait guère, j’ai apprécié néanmoins découvrir plusieurs pans de la question coloniale ici en France comme ailleurs, et qui permettent de sortir de fils en aiguille plusieurs histoires : mentalités, militaire, politique, mémorielle.

Découpé en plusieurs petits chapitres, ces pages nous proposent donc un partage de la recherche historique à l'huere actuelle sur la question des soldats coloniaux pendant la Première Guerre mondiale et même un peu après. L’approche des champs est comme je le disais plus haut variée, puisqu’on va découvrir les soldats dans leur intimité ou leur pensée, mais aussi les autres domaines autour de cette guerre qui sont plus politique, militaire, mémorielle. Et où il va notamment ressortir des batailles oubliées comme celle de Dobro Polje sur le front d’Orient, la vision du soldat par le gouvernement, et la vision du soldat sur la France idéalisée ou au contraire honnie par les soldats coloniaux, car c’est un pays d’infidèle ou de colonisateur par exemple. Ces derniers points peuvent cacher un ras-le-bol du conflit aussi.

Au-delà d’un rappel historique, ce livre nous renseigne aussi sur deux choses : les manquements de la France envers les soldats coloniaux et ces luttes existantes pour leur rendre la juste place qu’ils méritent. Il balaye aussi dans le même temps quelques clichés en passant, en contrant par exemple l'idée d'extrême-gauche qui raconte que les soldats coloniaux ont été de la « chair à canon » plus que les autres, ou en montrant les possibilités d'évolution dans la carrière militaire - bon à relativiser quand même, mais il y a eu tout de même une évolution au niveau de la carrière.
Toutefois, et s’il est vrai que la France a été oublieuse des soldats coloniaux, il ne faut pas oublier que les anciens combattants français de la métropole n’étaient pas forcément mieux traités, j’ai assisté à plusieurs conférences ouvertes au public qui mettaient en avant ce besoin urgent de reconstruire la France et donc d’oublier un peu les morts et les poilus.

Enfin, il est à noter un dernier petit détail à souligner car bien sympathique : l’ouverture du livre sur d’autres pays européens, tant sur la propagande par exemple l’Allemagne avec les musulmans qui a exacerbé l’islamisme, les atrocités de la Belgique, ou encore l’Italie qui a refusé d’avoir des soldats coloniaux dans ses rangs. Pour plus de précision sur ces sujets (et les autres) lire le livre.

A l’arrivée, ce livre était intéressant. Toutefois ma lecture fut en dent de scie pour les raisons expliquées plus haut et aussi parce que j’ai trouvé l’Afrique trop développée par rapport à l’Indochine. Mais dans l’ensemble c’est un livre utile à lire pour découvrir cette réalité que personne ne connaît même si tout le monde en parle, pour dépasser les discours politiques, et pour redonner à ces soldats leur juste place. Cela ne doit cependant pas empêcher de couper des liens empoisonnés aujourd’hui avec certains pays africains s’il le faut, et ne pas donner tous les droits aux descendants ou à ceux qui s’en prétendent. Ceux d’hier ne sont pas ceux d’aujourd’hui. Ne mélangeons pas politique et histoire. Un livre à lire donc, mais en prenant son temps.


Extrait :

« Au terme de cette réflexion, une première conclusion s’impose : la mémoire scolaire apparaît à la fois sociale et scientifique ; elle est aussi sensible aux effets de mode qu’à la réflexion académique, ce phénomène s’accentuant au fur et à mesure qu’on passe du lycée au collège puis à l’école primaire. En soi, cette réalité n’est pas condamnable : un manuel est un instrument de formation historique et civique. Mais un double biais peut poser problème. Le premier est la course à la victimisation. Pour la Grande Guerre, les souffrances s’accumulent, parfois se succèdent : les soldats, puis les femmes, puis les civils occupés, puis les colonisés. Depuis quelques années, c’est le génocide arménien qui tend à occuper la place centrale dans l’écriture de la Grande Guerre. Or, la tentation affleure de subordonner l’explication à l’émotion, de remplacer la hiérarchisation scientifique par la labellisation différenciée des souffrances particulières. A terme, gérer la communautarisation des mémoires souffrantes peut être un exercice difficile pour les enseignants du secondaire. Le second biais est que partout plane le spectre de la manipulation par l’Etat, sa presse et sa propagande. Il n’est pas difficile d’observer comment, ici ou là, la description de la Première Guerre mondiale est inconsciemment contaminée par celle de la Seconde Guerre ou du totalitarisme. Or, l’alliage de la victimisation et de la manipulation ne va pas nécessairement de pair avec la véritable compréhension de la réalité dramatique et de l’Histoire : elle peut à l’inverse nourrir les visions complotistes et les revendications communautaristes. »  Philippe Buton, p.347-348.

Editions Vendémiaire.

Note sur 3 :

 

bien mais

 

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